jeudi 20 janvier 2011

réseau culturel, espoir ou désespoir ?


Chers amis,

Le journal "Le Monde" se fait aujourd’hui l’écho d’un nouvel SOS lancé pour sauver le réseau culturel français de l’étranger. Cette fois ci c’est un ancien conseiller culturel qui monte au créneau (Cf l’article ci-dessous).

En 2010, nombreuses avaient été les Tribunes de presse pour dénoncer les coupes budgétaires dans le réseau diplomatique français, en particulier une chronique datée de l’été dernier co-signée par Alain Juppé et Hubert Védrine, et qui mettait l’accent sur les difficultés de fonctionnement de l’outil diplomatique français, et indirectement, l’abandon du réseau culturel, éternelle variable d’ajustement budgétaire du ministère des affaires étrangères.

La réforme Kouchner, accouchée dans la douleur, a abouti à la création d’un Institut français à Paris qui se veut une tête de réseau pour les différents instituts culturels du monde entier. Déjà une douzaine de postes diplomatiques verront dans les semaines à venir leurs établissements culturels rattachés à la nouvelle maison mère parisienne. En clair, cela signifiera que, désormais, moyens et stratégies de ces instituts seront gérés depuis l’Institut français de Paris et ne passeront plus par les fourches caudines de la Direction générale de la Mondialisation du ministère des affaires étrangères qui assure pour l’heure encore la tutelle des instituts culturels du réseau diplomatique.

Faut il se réjouir de cette expérimentation ? oui vraiment, si l’on considère le ministère des affaires étrangères comme « un bien mauvais maitre », et les Ambassadeurs comme des diplomates voyant, au mieux, le réseau culturel comme une belle danseuse qu’on est heureux de donner en spectacle de temps à autres, au pire, comme un réseau peuplé de « saltimbanques » qui vient parasiter de trop longue date la « noble action diplomatique française » (sic), celle mise en œuvre dans les Chancelleries…

Notre parti a fait depuis longtemps de la création d’une agence culturelle autonome, sur le modèle de l’AEFE, une des propositions fortes de son programme pour l’étranger. Cette proposition était contenue dans le programme présidentiel de la candidate Ségolène Royal et elle est portée depuis environ une dizaine d’année par le PS

Au-delà des motifs d’espoirs que peuvent donc susciter cette création de l’institut français à Paris sur les bases de Culture France, des motifs d’inquiétudes demeurent :

l'inquiétude sur les moyens de fonctionnement d’abord : les baisses de crédits et de postes continuent dans le réseau culturel, et l’année 2011 sera encore une fois celle du tribut à payer à Bercy, plus d’une centaine de postes d’agents du réseau devant être sacrifiés, des « missions d’audit » ayant commencé les coupes de postes en 2010 à Prague (une quinzaine d’agents d’instituts licenciés) ainsi qu’en Espagne et en Italie.

En 2011, on annonce de nouveaux « audits » dans les pays d’Europe Centrale (Pologne) ainsi qu’au Mexique ou dans d’autres postes culturels dont les « modèles économiques sont jugés déficiants ». Le langage en vigueur dans le réseau est désormais plus celui des comptables que des animateurs culturels…

Plus grave et au-delà des chiffres et du problème des moyens, le réseau culturel français continue à être divisé dans sa dualité entre des Alliances françaises plus autonomes, du fait de leur statut associatif, mais souvent aussi plus désargentées (parmi le millier d’AF dans le monde, seule une minorité est conventionnée par la Fondation Alliance de Paris et aidée par le ministère), et des instituts français qui sont les opérateurs privilégiés des services d’action culturelle des Ambassades pour agir avec des moyens publics souvent plus conséquents qu’en Alliance.

Cependant, les impératifs d’auto financement s’appliquent également de plus en plus en institut, et quand une structure est jugée insuffisamment rentable, c’est la fermeture qui est rapidement programmée (Cf une actualité récente en Suède que je laisse le soin à notre ami Christophe de développer)

Une autre critique concerne aussi Culture France, celle de la faible ambition de démocratisation culturelle de cette structure qui est le pivot du nouvel institut français à Paris. Trop élististe Culture France ? sans doute. Laissons le bénéfice du doute au nouvel Institut pour travailler sur de nouvelles bases dans les mois à venir…nous jugerons sur pièce.

Enfin, on ne sait pas trop quelle est la feuille de route du réseau culturel :

doit il rester un levier d’action diplomatique ? si oui, où doit s’arrêter l’autonomie de ce réseau et comment articuler son rôle avec l’action diplomatique globale des Ambassades ? S’il n’est plus un levier d’action diplomatique et qu’il devient un opérateur culturel en concurrence directe avec les industries culturelles mondiales, n’y a-t-il pas le risque d’une dilution de notre action et d’une faiblesse de nos moyens face aux mastodontes agissant dans les champs de la culture Mainstream (cinéma, musique) ? doit on dès lors agir dans des « niches culturelles », comme le spectacle vivant (théâtre, cirque etc…), la promotion de l’art contemporain, la promotion des cultures locales, afin de garantir une expression culturelle diversifiée, y compris et surtout quand ces cultures ne sont pas « rentables » ?

Comment continuer à garantir une aide au développement culturel dans les pays les moins avancés si nous nous replions sur une action culturelle privée de moyens publics et visant impérativement l’autofinancement et la rentabilité ?
Autant de questions sans réponse aujourd’hui…le réseau culturel a donc autant besoin « d’états généraux » pour poser et définir un nouveau cap et de nouvelles missions, que de moyens publics pérénisés…

A l’heure où la Tunisie se révolte et fait sa révolution démocratique, rappelons aussi que de nombreux instituts jouent le rôle de vecteur de démocratie, par l’accès à la presse étrangère qu’ils procurent dans leurs bibliothèques, par l’espace de liberté et de débat qu’ils fournissent souvent aux élites locales qui peuvent s’y réunir et s’y frotter au meilleur de la pensée française.

Derrière les questions culturelles se dissimulent donc aussi des enjeux plus globaux, comme celui de l’accès à la liberté, celle de penser et de s’exprimer, que le réseau culturel français est à même de garantir dans des pays dictatoriaux.

Boris



Ci dessous la tribune du journal Le Monde

"Il faut sauver le réseau culturel français à l'étranger"
LEMONDE.FR | 20.01.11 | 09h16

Depuis trois ans on assiste à la liquidation discrète de ce qui faisait depuis plus d'un siècle l'une des spécificités françaises dans le monde : son réseau culturel, composé d'instituts (voués principalement à l'enseignement du français), de centres culturels, d'Alliances françaises (de statut local, mais respectant le cahier des charges de l'Alliance française de Paris), d'instituts de recherche et de "maisons" ou académies (résidences de chercheurs ou d'artistes), tous coordonnés localement par le Service culturel et de coopération (SCAC) des ambassades.

C'était notre image de marque, le fonds de commerce de la France, le réseau le plus dense du monde, facteur d'une soft power sans égale pour employer le jargon à la mode. Ce réseau, qui reste le modèle du genre pour beaucoup de pays, le gouvernement actuel (et M. Kouchner en particulier lorsqu'il était au Quai d'Orsay) est en train de le démanteler en toute discrétion puisque aussi bien l'opinion hexagonale n'en connaît guère l'ampleur ni la réalité : interrogez votre voisin ou vos proches.
Or, un centre culturel n'est pas une danseuse, même si Bercy cible depuis longtemps ces centres de rayonnement de notre pays dont la "rentabilité" est évidemment difficilement chiffrable. Pourtant, ce rayonnement "rapporte" au plan de l'influence et même de la balance des paiements. Croit-on que ce maillage mondial n'était pour rien dans le fait que Paris et la France sont encore la première destination touristique mondiale, en raison bien sûr, et principalement, de leur richesse culturelle et du foyer intellectuel qu'ils sont depuis toujours ? Nos centres en étaient les relais, fréquentés par des dizaines de milliers d'étudiants et de visiteurs.

Preuve de cette efficacité, d'autres pays, imitant notre système, et alors même que la France ferme boutique, se mettent, eux à ouvrir des établissements similaires : la Chine ouvre partout de grands et efficaces "centres Confucius", et l'Espagne se lance, quant à elle, dans un beau projet de développement d'excellents "centres Cervantès", l'une et l'autre pour diffuser leur langue et leur pensée. Bercy n'est pas la seule instance qui avait à l'œil notre réseau : le ministère des affaires étrangère lui-même supportait mal cet archipel où œuvraient des agents pour l'essentiel, de par leurs fonctions, issus de l'éducaton nationale ou de ministères techniques. C'était aussi le cas de beaucoup de conseillers culturels des ambassades (chefs des SCAC), qui font localement fonction d'inspecteurs d'académie et étaient donc eux-mêmes des enseignants à l'origine.

Soucieux de conserver ces postes prestigieux dans son giron, le Quai d'Orsay a progressivement remplacé presque tous ces intrus par des diplomates de carrière, dont ce n'est pas tout-à-fait le métier. Quant aux établissements qu'ils gèrent, on n'y trouve presque plus aucun professeur détaché, sauf en contrat local (et souvent mal payés), même dans le réseau des écoles et lycées français destinés en priorité à nos ressortissants et gérés par une agence distincte.

400 POSTES SUPPRIMÉS

Comme si cette éviction ne suffisait pas, Paris a désormais prévu de supprimer dans les trois ans 400 postes dans les SCAC, que les ambassadeurs vont devoir désigner. Ne subsisteraient, en Asie par exemple, que quelques gros postes dans les pays émergents à la mode (Chine, Inde) alors que notre fierté était de mailler la quasi-totalité des pays, où la France jouissait (jouit encore pour le moment) de relais solides qu'on va sacrifier et qui nous oublieront. Un petit pour cent de ce qui va être, d'un trait de plume, attribué massivement à la Chine ou à tel autre très grand pays suffirait pour laisser allumées des petites loupiotes un peu partout.
Dans les centres, on assiste aussi depuis quelques années à une dérive inquiétante. Partout, on cesse de favoriser l'enseignement du français et on consacre l'essentiel des crédits à l'action artistique, souvent coûteuse. Faire venir une exposition ou une troupe prestigieuse, si on en a les moyens, c'est bien et ça plaît toujours aux ambassadeurs parce que cela se voit et impressionne leurs collègues étrangers. Mais une fois la troupe ou l'orchestre reparti, le public local a vite oublié, tandis que les centaines ou les milliers d'étudiants qui viennent assidûment deux ou trois fois par semaine suivre des cours de français et fréquenter la bibliothèque et la cafétéria du centre constituent une clientèle fidèle qui reste longtemps liée à la France.
Là où elles existent, les Alliances françaises font bien ce travail, mais elles n'existent pas partout et elles ne dépendent pas directement de nos services. Les activités culturelles elles mêmes étant victimes des coupes budgétaires, les directeurs de centres sont de plus en plus obligés de chercher des "sponsors" locaux, mais c'est de plus en plus difficile et cela aliène notre indépendance. Résultat : certains centres prêtent nos locaux à des confrères étrangers, ce qui peut être sympathique (dans le cadre européen) de temps en temps, mais pour le coup, n'est pas défendable devant les contribuables français.
Cerise sur le gâteau, M. Kouchner, qui n'avait aucune expérience en matière d'échanges culturels, a transformé le conseiller culturel de certaines ambassades en "attaché humanitaire" comme si les deux fonctions avaient quelque chose en commun. Bien sûr, dans ces postes, l'essentiel des crédits passe à l'humanitaire, souvent d'ailleurs pour des actions multilatérales, ce qui est défendable mais ne confère aucune visibilité à l'action de notre pays. Un centre culturel français, ce n'est pas Médecins sans frontières.
Tout n'est peut-être pas perdu si Mme Alliot-Marie, plus sensible sans doute que son prédécesseur à la diplomatie culturelle de notre pays, met à profit son arrivée récente au Quai d'Orsay pour redresser immédiatement la barre et remettre les choses d'équerre. Il a fallu parfois des années d'efforts et de négociations pour ouvrir certains centres dans des pays "sensibles" et implanter le français dans certaines régions du monde.
Ne laissons pas s'éteindre ces foyers de présence française qui coûtent très peu et in fine rapportent beaucoup parce qu'ils font que la France est encore, malgré sa démographie, une puissance mondiale, présente partout par l'esprit et la culture. C'est de leur survie aussi, ou de leur disparition, que dépend la réponse à apporter au livre de Jean-Pierre Chevènement : La France est-elle finie ?

Jean Hourcade, ancien conseiller culturel

mercredi 12 janvier 2011

une conscience globale pour agir ensemble




Aujourd'hui, je reviens sur le texte envoyé par un camarade de Bruxelles, qui insiste sur le rôle de proximité des élus politiques dans une société en désagrégation sociale.

je développe une analyse sur le thème du "penser global agir local" une antienne politique d'aujourd'hui, en liaison avec le dernier ouvrage de Stéphane Hessel.


Cher Emmanuel, Chers camarades

C’est une analyse qui me semble lucide sur une société compartimentée, inégalitaire, où le monde des campagnes et le monde des villes, tout en s’éloignant l’un de l’autre, sont frappés par les mêmes syndromes de désagrégation sociale.

Il est étrange d’ailleurs que « la communauté de malheurs » ne débouche pas davantage sur une solidarité de lutte, propitiatoire à la création d’une « communauté de destin », de celle qui depuis Renan forgent l’âme et l’unité d’une nation comme la notre :

Je voudrais revenir sur le livre de Stéphane Hessel, dont on parle beaucoup et qu’Emmanuel évoque, et essayer d’en tirer quelques enseignements pour aujourd’hui : non pas sur le contenu du livre, qui me semble relativement basique dans son message de révolte, mais plutôt sur l’histoire du redressement du pays incarné par la génération de Stéphane Hessel au sortir de la guerre :

La génération de Stéphane Hessel a œuvré dans des temps de grandes souffrances, pendant et après la guerre, pour redresser le pays et réinventer son organisation sociale, le programme du Conseil national de la résistance fournissant un cap politique général, un projet de réforme sociale et politique du pays et de nos institutions, qui sera mis en œuvre par les partis politiques issus de la guerre (les mouvements de résistance s’effacèrent assez rapidement devant les partis http://www.crdp-reims.fr/cinquieme/evolution_politique.htm)

Cette « unité nationale » ne dura donc pas longtemps puisque le tripartisme en vigueur au sortir de la guerre (SFIO, PC, MRP) se fera sans les gaullistes, démissionnaires à partir de janvier 1946, puis sans le PC à partir de l’exclusion en 1947 des communistes du gouvernement, la 4eme république gouvernant alors dans l’instabilité des coalitions.

Un pays dès lors gouverné médiocrement, a néanmoins été un pays qui a pu connaitre un redressement économique et social durable, grâce notamment au rattrapage économique bien identifié par un économiste comme Daniel Cohen (qui s’exprimait hier sur les ondes de France 2 dans une remarquable émission sur la crise), d’une économie de croissance continue et durable rattrapant son retard sur les Etats Unis.

Le rôle des syndicats, puissants à cette époque, l’organisation des entreprises et de l’économie en France, autour d’un patronat paternaliste agissant dans un capitalisme de production, permettait le partage « des fruits de la croissance», par le biais d’un classique rapport de force (la véritable indignation serait donc sociale !) mais aussi par l’intérêt bien compris de certains patrons ayant bien deviné l’intérêt d’augmenter les salaires : selon Daniel Cohen, en 10 ou 15 ans, les salaires et le pouvoir d’achat furent ainsi doublé en France, et ces augmentations nourrirent à leur tour la consommation dans une économie n’oubliant pas d’investir pour remodeler son tissu productif en le modernisant (aéronautique, pétrochimie, nucléaire seront dès lors les mamelles industrielles de la France)…

les trente glorieuses furent donc cette période où, malgré une 4eme république bringuebalante, malgré une situation de fin de colonisation douloureuse en Algérie et en Afrique Noire, malgré une classe politique finalement enferrée dans le « régime des partis » et les recompositions incessantes des gouvernements dans un système parlementariste un peu échevelé, la force du développement économique et social s’imposera en France. Certainement grâce aux corps intermédiaires, à leur force d’indignation sociale, et aussi par l’organisation même du capitalisme d’alors, plus équilibré finalement que celui d’aujourd’hui, « plus réformable » au sein duquel les syndicats jouaient un rôle d’aiguillon social plus marqué.

La conclusion et l’enseignement que je tire de cette rapide analyse est qu’il appartient surement aux forces politiques de gauche en 2011 d’aider à la revitalisation d’une conscience collective, en situant les origines de la crise actuelle, qui est tout autant une crise économique et financière, qu’une crise plus globale de civilisation, et en proposant un projet global pour la France et l’Europe afin de retrouver un élan positif pour les peuples de cette partie du monde qui se fasse en bonne compréhension et en bonne intelligence avec les peuples du reste du monde et permettent à nos économies de trouver un nouveau souffle.

Mais cependant, dans un monde complexe, où l’on ne parle plus de gouvernement du monde mais de « gouvernance », pour bien marquer la nouvelle complexité du fait de diriger et de décider ensemble, que ce soit une entreprise, une administration, un pays ou une région du monde, il appartient aussi aux « politiques » en général de faire preuve d’une forme d’humilité en agissant plus globalement avec toutes les autres forces de transformation sociales en œuvre dans notre société et notre vaste monde globalisé :

-La réforme sociale de notre société, proposée ou dessinée par les politiques, ne pourra se faire sans les autres corps intermédiaires qui devront trouver un nouvel élan, je pense notamment ici aux syndicats qui devront tirer partie de la nouvelle loi sur la représentativité syndicale pour se recomposer, pour relancer leurs effectifs et redonner sens à leur projet de transformation sociale, alors que le syndicalisme en France est frappé par une double crise d’ effectifs et de raison d’être.

-La montée en puissance des mouvements sociaux européens, le renforcement des liens entre syndicats dans le cadre des confédérations européennes, la coordination des luttes, devrait permettre de lier ensemble les divers combats sociaux européens, de créer des solidarités de fait entre les travailleurs des diverses parties de l’Europe à 27, de faire pression pour que nos gouvernements cessent d’organiser eux-mêmes le dumping social interne entre les économies de notre communauté.

-L’Europe est l’échelon d’action incontournable, et c’est sa réforme que nous devons avoir en ligne de mire pour lutter contre les populismes européens par la mise en place d’institutions européennes plus démocratiques, plus protectrices pour les peuples, avec un projet européen plus régulateur et moins libéral qu’aujourd’hui (ce qui est un profond défi étant donné le logiciel très libéral qui forme le soubassement du (non) projet actuel en Europe)

-La réforme sociale de notre société ne pourra se faire sans tenir compte du reste du monde et de sa propre évolution : si l’on s’inquiète à raison des effets des délocalisations, de la désindustrialisation accélérée dans notre pays, il faut aussi trouver la voie entre le juste niveau de protection de notre tissu industriel, au niveau français et européen, et le juste niveau de co-développement mis en œuvre pour aider et accélérer le développement des autres nations du monde : plus la Chine et l’Inde introduiront dans leurs économies de développement social, plus la pression à la baisse des salaires en Europe se desserrera…le concept de « juste échange » est surement ici le plus novateur politiquement qu’on ait pu créer ensemble lors de nos débats conventionnels en 2010 au PS.

Le capitalisme financier, dérégulé que nous connaissons depuis 30 ans (depuis Reagan et Thatcher et les mouvements de dérégulation économiques globaux) doit être réformé profondément, et ce sont surement les « BRIC », ces nouveaux émergents que l’on devrait plutôt appeler les « nouveaux puissants de ce monde », qui doivent être convaincus de l’intérêt de modèles de développements durables pour nos économies confrontées à la crise environnementale globale, qui permettent l’enrichissement et l’épanouissement collectifs des peuples et le relèvement des pays les moins avancés par le partage des fruits de la croissance mondiale.

En conclusion, si je crois, comme Emmanuel, au rôle de proximité des élus politiques, je crois aussi à la nécessité des corps intermédiaires dans un pays où l’Etat ne peut pas tout tout seul (c’est l’héritage de la deuxième gauche qui parle ici), je crois de plus en plus à la nécessité, internationaliste, d’agir ensemble au niveau global pour tirer partie, à l’échelon national, des bénéfices d’un monde qui serait régulé et d’un capitalisme qui serait transformé, pour le plus grand bénéfice des peuples.

La lutte est donc globale ; « La tête et les jambes », pensant et se mobilisant ensemble, au niveau européen et mondial. Et au dessus de la tête, une « âme globale », la conscience collective de naviguer sur le même bateau dans l’océan du développement économique mondial.

Amitiés socialistes

Boris


Message d'Emmanuel intitulé "la tête et les jambes"



Bonjour

L’année 2011 reste une année de grands choix, les regards se portent sur nous les militants, à la fin de nos séjours ou de nos repas de fêtes nos interlocuteurs ayant fait le tour de leur menu, de leur projets de vacances pour certains se tournent finalement sur le représentant du PS et alors ?

Indépendamment des choix de personnes que nous devrons acter et au-delà des débats de familles que cela va nécessiter, tout va compter, je pense que le leader devra monter sur le front avec l’ensemble de la diversité du PS.

Les défis économiques, internationaux et environnementaux sont grands, mais ces défis ne seront qu’une partie de l’iceberg que nous devrons affronter.

Le visage de la société française se fissure à l’image de nos sociétés européennes, la sociologie devient complexe, et difficile à toucher.

Stephane Hessel s’indigne à raison avec le recul nécessaire de sa génération et la noblesse de son passé. La reconstruction d’après-guerre correspondait à un élan partagé, et les différents morceaux de la société étaient tous proactifs et engagés par rapport à leur destin.

La posture de Stephane Hessel avait du sens car elle avait un écho dans l’ensemble de la société, au-delà du projet intellectuel de nos résistants, des relais existaient dans la société.

Le post 2010 est dur, tant le répondant de la société est éclaté, la fracture je n’ose plus la regarder. Entre 1990 mon entrée en région parisienne et un retour furtif fin 2010 dans la banlieue ouest, j’ai froid.


Comme dans de nombreuses sociétés occidentales, le populisme fait ses choux gras face aux impatiences du peuple, face aux problèmes, la raison est mise aux placards, le discours de proximité, de la cause immédiate l’emporte, c’est la tendance du consumérisme. Une tendance lourde mis en avant par le journal Suisse l’hebdo en prenant exemple sur le cas de l’Italie. Personne n’est épargné, les partis politiques, mais même les églises, le mouvement évangélique progresse. Ce dernier propose une réponse facile aux questions des pauvres. Le but affiché est le résultat à court terme. Notre nouvelle madone de bar s’appelle Marine.

Les riches sont aveugles et deviennent exigeants. Par la force des choses leurs quartiers sont coupés du reste de la société, les prix de l’immobilier organisent une ségrégation parfaite. Pressurés par leur activité professionnelle, leur échappatoire est le prochain voyage et leurs prochaines vacances de plus en plus loin pour découvrir le monde et peut être fuir l’immédiat.

Un ami me parle de sa fille de 16 ans déjà partie un an en Nouvelle Zélande, intuitivement heureux de ce choix à comparer avec les US une destination banale. Un éloignement salutaire pour son adolescente qui avait besoin d’éloignement pour prendre du recul, un recul dirais je utile mais pour une somme de 10 000 euros. Nous avons tous besoin d’éloignement mais jusqu’où se feront les limites de nos choix.

Je suis perdu, il y a 20 ans dans cette ville de la région parisienne je pouvais encore m’identifier aux parents de ces cadres supérieures, ces derniers s’évadaient dans nos campagnes françaises, une façon de retoucher terre et ils me disaient qu’ils avaient mangé des nouilles pour acheter leurs maisons. Le slogan « travailler plus gagner plus » parle à ces générations de plus de 60 ans, Sarkozy le sait et il axe sa campagne sur la génération des trente glorieuses, mais pour la suite c’est de la folie.

Les pauvres se regroupent, les cas extrêmes apparaissent sur le trottoir en devanture, en fait ces cas restent isolés, la masse est calfeutrée dans son quartier sans projet. Mes fils pourtant aguerris dans leurs parcours bruxellois, ont les yeux ébahis face aux bandes d’ados zonant dans la galerie de la gare du nord. Avec juste pour miroir, les vitrines de gadgets, symboliquement nous sommes dans un passage souterrain, nous flottons dans une parenthèse un 31 décembre. Le lendemain nous boirons le champagne à la Celle St Cloud.

Un pasteur ancien syndicaliste m’écrit ses vœux avec un certain pessimisme, hors de région de parisienne à Chaumont en Haute Marne (52), la campagne tranquille loin de Paris, pourquoi aurait-il à pleurer ? Il est confronté à la ségrégation des quartiers et au vide culturel. Il fait de l’animation socioculturelle avec les moyens du bord, mais surtout il est face à la passivité des hommes. Cela le déprime.

Globalement nous avons les chiffres et nos analyses statistiques qui permettent de connaître cette situation, et de la suivre. C’est un suivi conjoncturel de la pauvreté. La question n’est pas tant l’inégalité financière, mais l’inégalité en termes de mobilité et de projet pour certaines personnes.

La gauche devra rassurer par rapport à sa maitrise des grands sujets, mondialisation, analyse économique, sa connaissance de la situation et son savoir faire en terme de répartition (protection sociale, retraite, santé)

Mais la gauche devra avoir des relais de terrain et des hommes de proximité. Je pense que nous avons de nombreux élus locaux, leurs poids doit pouvoir compter.

La tête et les jambes

Emmanuel

Section de Bruxelles

mardi 4 janvier 2011

rapide bilan politique de l'année 2010


Chers amis et camarades,



*L'année 2010 en France a été une année de crise et si "le fond de l'air a été rouge", pour reprendre le titre d'un film de Chris Marker, le front social qui s'est mis en place contre la réforme injuste des retraites n'a pas résisté à l'arrivée de l'hiver. La droite au pouvoir sous la conduite de Nicolas Sarkozy continue son oeuvre de casse sociale, le budget 2011 est encore une fois un budget de disette, et la sinistre RGPP qui s'apparente toujours plus à une restriction des politiques publiques continuera à produire ses effets délétères l'année prochaine.

Cette droite de gouvernement a failli moralement : l'affaire Woerth, le replatrage Fillon 3 et le retour de l'Etat RPR, la récente affaire Hortefeux, à nouveau condamné par la justice, les atteintes aux libertés de la presse avec des vols suspects d'ordinateurs de journalistes, la mise au pas de la justice, sont autant d'accrocs dans le contrat qui cimente la République et les français.

La France s'est perdue dans le débat sur l'identité nationale, elle s'est déshonorée dans la stigmatisation des Roms, et on sent à nouveau monter en France les remugles de l'extrème droite, qui malgré un pseudo masque de modernisme incarné par Marine Le Pen, reste fidèle à ce qu'elle est au fond : intolérante, xénophobe, populiste, et pour tout dire écoeurante.

Bien sur, nous ne pourrons pas gagner en 2012 sur la seule réprobation morale et il serait dangereux de ne gagner que par défaut, par épuisement de l'adversaire de droite.

Il nous faudra gagner dans moins de deux ans pour de bonnes raisons afin de lutter pour l'emploi pour tous, de faire reculer la précarité, de redonner àl'école les moyens de ses ambitions pour faire reculer les inégalités en France, pour combattre les discriminations et remettre de l'unité nationale dans un pays menacé par les tentations de repli communautaristes, pour proposer aussi des solutions novatrices en matière environnementale.

La France devra aussi retrouver en Europe et dans le monde sa place, celle d'une nation qui ne renonce pas à faire entendre "sa petite musique personnelle", tout en sachant aussi jouer une partition collective avec les 26 autres pays de l'Union, une union européenne que nous devrons rendre plus proche des citoyens, plus vivante mais aussi plus forte, car tout le monde est convaincu désormais que l'Europe est le bon niveau d'action pour agir dans un environnement mondialisé et dans une planète où le capitalisme de casino fait des ravages en faisant trinquer les peuples au banquet de la misère.

**Si L'année 2010 a été difficile pour la France, elle a néanmoins été une année de travail pour le parti socialiste qui est resté concentré sur ses devoirs : Si le parti socialiste s'est opposé à la politique du gouvernement Fillon Sarkozy, il a aussi su se préparer à l'alternance et organiser ses idées, choisir ses priorités politiques : Nous nous sommes ainsi penchés sur les quatre textes des conventions organisées par le Parti (nouveau modèle de développement, rénovation, europe et international, égalité réelle) et nous avons également désigné nos de candidats pour la future législative qui incarneront les idées collectives du parti.

Les amendements rédigés en section dans notre fédération n'auront pas été un exercice vain puisque l'on retrouve traces de nos travaux dans les différents textes, ce qui nous a valu notamment d'arracher le principe de primaires socialistes à l'étranger, ce qui n'était pas prévu initialement dans le texte porté par Arnaud Montebourg sur la rénovation. Nous avons pu aussi faire mentionner quelques unes des problématiques des français de l'étranger, sur l'éducation et les questions consulaires notamment, dans le texte sur l'égalité réelle, sns parler bien sur des textes nouveau modèle et international où des amendements ont été retenus.

Sur le plan des idées, il faudra en 2011 finaliser ce travail de réflexion collective, d'abord en nous dotant d'un solide projet fédéral. Des groupes de travail sont à l'oeuvre, et je vous conseille de vous rapprocher des responsables de ces groupes pour apporter votre pierre à l'édifice. Je redonnerai aux personnes intéressées la liste des groupes en janvier. Le projet fédéral devrait être calé pour fin mars.

Par ailleurs, le Projet des socialistes, c'est à dire notre feuille de route politique pour gagner en 2012, reprendra les thèmes des 4 conventions et devrait faire l'objet d'une élaboration collective au printemps/été 2011.

***2011 sera une année politique capitale, puisque nous devrons organiser les primaires socialistes, dans l'hexagone comme à l'étranger, sans savoir encore clairement quel sera le menu proposé en terme de nombre et de profil des candidats, même si les premières déclarations de candidatures ont déja eu lieu.

J'emets le voeu que les esprits militants ne soient pas trop accaparés uniquement par le virus de la "présidentialisation", et que tout en faisant valoir nos choix pour tel ou telle candidat(e), nous nous épargnons entre nous la peste de la division.

Le parti socialiste n'est jamais si fort que quand il est uni. Le vieux mythe politique de l'unité à gauche doit trouver une expression dans nos rangs. Le candidat aux présidentielles devra être un porte parole du parti socialiste et devra savoir jouer une partition collective, sans fausse note. Il faudra également aller au devant de nos partenaires de gauche, sans hégémonisme, mais avec la conscience que notre parti demeure le pivot d'une victoire à gauche qui ne pourra avoir lieu qu'avec des accords avec les autres partis partageant nos idées.

2011 sera aussi l'année où débutera la grande aventure de la campagne des législatives. Tous les candidats désignés dans les différentes circonscriptions auront besoin de nous tous pour les accompagner dans leur bataille face à la droite. Nous espérons aussi que les circonscriptions gelées pour l'heure, bourgeonneront bientôt de candidat(e)s de valeur, issus du terrain.

Nous devrons faire de chaque section une matrice de formation, pour donner à chacun et à chacune un rôle dans cette campagne, en fonction des énergies et des envies de chacun. Nous ne pourrons gagner qu'en "tenant la distance", le chemin sera long jusqu'en 2012, et nous devrons cultiver la solidarité et les valeurs du travail collectif.

Au plaisir de vous retrouver, je vous souhaite de manière très sincère d'excellentes fêtes de fin d'année.

Amitiés socialistes

Boris