mardi 8 décembre 2009

Oser la rupture idéologique, garder la foi





un commentaire en forme d’interrogation historique, à la suite du texte de Marcel Gauchet (publié sur ce blog à la suite de mon article du jour) :



- Pourquoi la crise actuelle a-t-elle pour effet d’accentuer la crise de la gauche alors que la précédente crise majeure, celle de 1973, la crise du choc pétrolier marquant la fin des trente glorieuses et l’entrée dans l’ère du chômage de masse, a produit exactement l’inverse, soit la victoire historique de 1981 ?



Le projet de 1981 se voulait projet de rupture par rapport au capitalisme et de contestation des dérives de la société de consommation. Même si la tradition politique de Mitterrand était catholique et de droite, son pragmatisme naturel l’avait conduit, à la suite de deux défaites aux présidentielles, à considérer le discours de contestation de la société de consommation et la nationalisation de pans entiers de l’économie comme les piliers constitutifs d’un programme politique basé sur l’union de la gauche.


C’était donc un projet capable de réunir les nouvelles forces de gauche issues de l’après 68 aux marxistes plus traditionnels (partisans du dirigisme d’Etat), et aux keynésiens de gauche, favorables à la relance économique de la demande intérieure.

Bien entendu, le virage de 1983 est venu rappeler douloureusement l’impasse d’une relance keynésienne classique dans une économie ouverte. Les dévaluations du franc et le déficit de la balance commerciale ont sonné le glas de cette politique trop isolée dans une Europe en passe de se convertir au tout libéralisme et au libre échangisme échevelé.

Or, la gauche n’a jamais osé faire le procès du libre échangisme et s’est inscrite au contraire dans la construction d’une Europe qui a fait du libre échange un dogme, à l’intérieur du marché des 27 (le marché unique de la concurrence non faussée) comme à l’extérieur (les droits de douane et barrières commerciales aux exportations ont été abaissées continuellement).



La Gauche est aujourd’hui lestée par ce tournant de 83 assimilé à une forme de renoncement des idéaux de gauche, même 25 ans après. L’expérience de gouvernement Jospin, la douloureuse défaite de 2002, celle d’un projet qui ne se voulait plus socialiste, vient brouiller encore davantage le fond idéologique de la gauche d’aujourd’hui, faute d’inventaire ou d’aggiornamento sur nos expériences de gouvernement passées. Nous donnons donc l’impression d’être à la fois favorables au capitalisme, comme horizon indépassable, et au libéralisme, comme réalité économique incontournable.

Mettre à jour notre programme idéologique pour développer un projet alternatif revient donc d’abord, à reposer la question des protectionnismes nécessaires et des logiques de coopérations régionales à mettre en œuvre pour réduire les inégalités issues d’un monde du tout libéral et reposer la question des nationalisations bancaires, comme rupture avec le tout capitalisme.


Voilà une base de départ idéologique possiblement marxiste.

Le changement de modèle de croissance et la nécessité d’une économie verte dans une société du temps libérée (par la progression constante de la productivité), pourrait être également le point d’arrivée idéologique d’une révolution de gauche, commencée par Marx, et qui trouverait dans les problématiques d’aujourd’hui son dépassement.


La désaffection à l’égard de l’engagement politique, le retour vers les valeurs du privé, décrits par Marcel Gauchet, ne sont pas des fatalités si l’on refonde la politique : Technique démocratique de gouvernement, certes, mais aussi croyance en une utopie active, le socialisme.

Gardons la foi

Boris

Varsovie

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire