mardi 6 octobre 2009

Pour le mandat unique dans un parti de militants





Le débat continue sur la limitation du cumul, alors que la consultation du premier octobre a montré que les militants PS étaient très favorables à avancer sur la question du non cumul.

Aujourd'hui je réponds à un camarade qui m'interpellait sur mon argumentaire en faveur du mandat unique en réponse à une interview de Gérard Collomb...


Cher Patrick,


Nous avons en effet déjà lancé ce débat sur le non cumul sur ce forum et pu échanger ensemble en confrontant nos points de vue.


C’est un débat crucial et je suis heureux aujourd’hui qu’il anime encore notre forum alors que les résultats de la consultation du premier octobre sont connus et ont exprimé un clair désir de changement pour aller vers une réduction des cumuls possibles.


Il n’est pourtant pas interdit aujourd’hui de vouloir avancer plus loin sur ce thème en clarifiant nos positions sur le thème du mandat unique, au moins à l’échelle fédérale. Le questionnaire du premier octobre a avancé de manière prudente sur la question de la limitation du cumul, ne l’appliquant pas aux régionales prochaines, et le limitant à l’interdiction de cumul entre une fonction de direction d’un exécutif local et une fonction parlementaire.

La direction du PS est prudente sur cette question de non cumul alors que le mandat unique a pourtant les faveurs majoritaires des militants. Evidemment, le fait que 80% des parlementaires soient en situation de cumul, comme le rappelle notre camarade Baptiste Ast de Bruxelles, n’est pas étranger à cette prudence de sioux. Mais ne pourrait-on pas proposer une motion fédérale de la FFE pour nous positionner politiquement sur le mandat unique, dès lors que cette option apparaitrait comme majoritaire dans nos rangs ? Je crois que l’audace nous est permise si l’on veut accompagner le mouvement de rénovation…et même sur certaines questions cruciales, le devancer.

Maintenant quelques précisions complémentaires pour continuer à enrichir le débat :

Je ne ferai de procès en insincérité à quiconque et dans le cas de Gérard Collomb, je respecte évidemment la franchise des réponses même si je n’adhère pas à la logique qui les sous tend. Gérard Collomb cherche simplement à justifier et reproduire le modèle qui l’a porté à exercer aujourd’hui 3 mandats (Sénateur, Président d’agglo et maire de Lyon). Une logique de progression de carrière, qui obligerait à passer nécessairement par la case territoriale avant de briguer un mandat national. Ce qui suppose, en contrepartie, une inscription dans la durée de la carrière d’un homme ou une femme politique et une professionnalisation autour du métier d’homme politique. Ce qui suppose encore un parti de type SFIO où ce sont les problématiques et les rapports de force locaux qui doivent gouverner notre organisation interne.

Je crois à une vision alternative de la politique, comme sacerdoce et non comme profession, qui s’incarne dans un parti de militants et de combat : Un modèle de parti plus participatif, plus divers dans son recrutement, et plus déterminé dans son projet politique national clairement positionné à gauche.

Un parti de militants suppose de limiter dans le temps le nombre de mandats successifs et de s’en tenir à l’exercice d’un mandat unique.

Dans un parti de militants, l’exercice d’un mandat ne doit d’ailleurs pas être une fin en soit. Si le parti jouait à plein son rôle de formation, de réflexion, et de proposition de mesures politiques pratiques de réformes, on éprouverait certainement moins le désir dévorant de se précipiter vers les mandats puisqu’il y aurait des manières alternatives de peser sur le réel et de participer au changement de l’ordre des choses. L’exercice d’un mandat pourrait être un passage, limité dans le temps, dans la vie d’un militant qui pourrait ensuite faire valoir l’expérience acquise en tant qu’élu sur le terrain des luttes sociales.

Car, dans ce parti d’action sociale et politique, démocratie sociale et démocratie politique seraient réunies afin de participer à la transformation sociale sur le terrain du réel. Cela supposerait une profonde « révolution »de notre tradition qui aujourd’hui sépare clairement le champ d’action syndical du terrain d’action politique depuis le congrès d’Amiens de 1906 :

Le Parti devrait donc imposer systématiquement, comme c’est d’ailleurs le cas théoriquement dans notre charte de principe, l’exercice du militantisme syndical (ou associatif) comme contrepartie du militantisme politique ; Etre présent dans le monde du travail sur le terrain des luttes sociales vaut à mon sens en terme d’expérience n’importe quel mandat territorial.

Ce qui se passe aujourd’hui avec le référendum sur la privatisation de la poste organisé notamment par les représentants syndicaux n’est il pas le plus beau des gestes politiques ? Qui permet d’aller à la rencontre des usagers, de débattre et aussi de proposer une évolution pour La Poste qui ne passerait pas par la privatisation. On aimerait être présent en tant que membres du PS sur ce terrain là.

Or, au PS aujourd’hui on ne sait comment utiliser les militants…

Dans notre parti, les militants semblent malheureusement souvent condamnés à jouer les lampistes ou les faire valoir dans un parti d’élus proche du fonctionnement de la SFIO (cad un parti qui ne sait pas réellement comment utiliser ses militants…) : avec cependant une différence majeure puisque la SFIO avait une structure de pouvoir central extrêmes légère se limitant à quelques permanent alors que le PS cumule aujourd’hui les désavantages de la SFIO avec ceux de l’extrême centralisation du pouvoir, ce qui n’est pas le moindre de ses paradoxes, et qui aboutit à tant de lourdeurs et de conservatismes.

La rénovation impulsée aujourd’hui par la direction de ce parti est donc un reflexe de survie élémentaire dans un parti qui est arrivé à la fin d’un cycle historique dans ses formes actuelles. Cette rénovation, nous militants, nous devons donc l’encourager et sur certains points, la devancer en réclamant encore plus d’audace.

Le dépassement de la séparation théorie/pratique se réalisera grâce à la diversification du recrutement du personnel politique…(et non par le cumul des fonctions nationales et territoriales)


Je crois que ce qui peut effrayer les contempteurs d’une vision trop théorique de la politique, dont tu es Patrick, c’est certainement le constat que le monde des parlementaires manque de diversité…Ce que l’on peut déplorer, en termes de visions politiques « déconnectées du terrain », est certainement lié aux ravages d’une sociologie parlementaire trop uniforme et qui ne reflète pas assez la diversité sociale. Si les hommes et femmes politiques ont tous, peu ou prou, le même parcours, s’ils proviennent tous des mêmes milieux sociologiques, on peut craindre en effet une certaine déconnection des « réalités » ou plus exactement de la complexité du social. Dans cette idée, le cumul de responsabilités territoriales et nationales ne peut rien pour rendre l’exercice des mandats plus pratiques si le moule de pensée, et j’entends par là le conditionnement du moule sociologique initial des hommes politiques, reste trop uniforme.

Ouvrons donc les portes du palais Bourbon aux syndicalistes, aux responsables associatifs, à davantage d’ouvriers et employés, cassons donc la logique cooptative de « la République des Notables » qui n’a pas foncièrement changé ses modes de recrutement depuis la 3eme république...Et l’on verra la séparation supposée entre « théoriciens et praticiens » s’estomper immédiatement. C’est la diversité sociale dans nos rangs qui sera le meilleur des gages qualitatifs pour des parlementaires sachant parler, agir, et réformer le « réel » avec efficacité.


A-t-on réellement tant de théoriciens que cela dans nos rangs ?



Je finirai par une pointe d’humour : Si le palais Bourbon ou le palais du Luxembourg comptaient réellement en son sein des théoriciens…des théoriciens du socialisme j’entends…cela se saurait.



Je crois qu’hormis quelques rares exceptions que l’on retrouve dans les cercles de pensées du PS comme la fondation Jean Jaurès par exemple, rares sont ceux qui sont aujourd’hui intéressés par les approches théoriques et réflexives.



Et pourtant…il y aurait tant à faire en terme théorique dans cette époque où « repenser le marxisme », et se doter d’outils théoriques pour terrasser le capitalo libéralisme triomphant, n’est en rien un luxe…théorique !



Mais j’ai été déjà trop long…



une rénovation est en marche. Et il faut choisir résolument le camp de l’espérance…en tentant d’être « l’avant-garde militante » de la rénovation de la pensée socialiste et d’une refondation du parti. Vaste et beau programme.



Amitiés socialistes et fraternelles



Boris

Varsovie

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