mercredi 28 octobre 2009

Pourquoi le PS n'est pas un parti social démocrate




J’ai cherché à savoir si le PS était un parti social démocrate ou pas. La question est récurrente sur les forums de discussion du PS et, depuis un ouvrage célèbre de Rosa Luxembourg, la crise de la social démocratie est régulièrement évoquée chaque fois que les partis de gauche subissent un revers électoral, comme ce fut le cas lors des dernières élections européennes.

Pour trancher cette question, il faut se référer à l’histoire du mouvement socialiste et aux formes d’organisation propre à un parti social démocrate.

Historiquement, à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème, moment où s’affermissent les distinctions dans le mouvement socialiste international, un parti est considéré comme social démocrate quand il se situe dans une optique socialiste de transformation sociale qui passe par le réformisme et le parlementarisme (c’est donc un parti qui accepte de se présenter aux élections et d’avoir des parlementaires ; l’ancêtre du SPD allemand présente des candidats aux élections parlementaire dès 1871 ).

A l’origine, la Social démocratie se distingue donc du marxisme qui se situe dans une optique révolutionnaire de changement social.

Ensuite, dans le courant du 20ème siècle c’est la référence à l’économie de marché qui, après la référence au marxisme révolutionnaire, devient la ligne de partage entre partis socialistes et partis sociaux démocrates. Le SPD a ainsi accepté l’économie de marché dès 1959 au congrès de Bad Godesberg. En France, la référence à la révolution est abandonnée et la conversion à l’économie de marché se fait seulement en 1983, sous la pression des circonstances économiques de l’époque plus que par choix idéologique clair (ce qui pose pb jusqu’à aujourd’hui en terme d’identité...).

Historiquement, le PS n’est donc pas un parti social démocrate même si depuis 1983 il en prend l’allure.

Cependant, une distinction formelle et institutionnelle subsiste, qui empêche de définitivement classer le PS dans le champ des partis sociaux démocrate.

En effet, un parti social démocrate unit étroitement militantisme social et militantisme politique en son sein, afin de faire progresser dans un même combat, la démocratie sociale, c'est-à-dire le progrès social dans le monde du travail, et la démocratie politique, c'est-à-dire le progrès politique au sens le plus large.

Or, en France, et ce depuis la charte d’Amiens de 1906, l’indépendance syndicale prévaut par rapport aux partis politiques, et si le PS compte des militants syndicaux dans ses troupes, s’il encourage la double adhésion, il n’accorde en revanche aucune place institutionnelle particulière dans ses instances de direction, locales ou nationales, aux responsables syndicaux.

En ce sens, le PS n’est pas un parti social démocrate, à la différence du SPD qui accorde une place majeure aux syndicats dans ses structures et s’appuie notamment sur la négociation entre partenaires sociaux et les conventions collectives pour transformer l’économie sociale. En France, la loi est nettement préférée comme instrument de transformation sociale, les conventions collectives ne venant souvent qu’en complément ou appui.

Conclusion : si le PS, depuis 1983, a rallié l’économie de marché et peut sembler s’orienter sur un chemin social démocrate, son histoire, ses références aux marxismes qui demeurent, et son mode de direction, indépendant des syndicats, le font demeurer comme un parti socialiste qui se cherche une identité.

Amitiés socialistes

Boris

2 commentaires:

  1. Je pense que le travaillisme, le socialisme et la social-démocratie sont trois tendances d'une meme famille.

    Les différences peuvent etre idéologiques mais me semblent avant tout le fruit d'une histoire sociale et politique, propre à chaque pays.

    Le critère "organique", lien syndicats/parti politique, élément historique d'identification de partis socialistes ou soc-dem, me semble moins opérant aujourd'hui.

    Le SPD, le Labour, le PSOE gardent des liens avec les syndicats mais leur influence dans les directions respectives de ces trois partis est moindre aujourd'hui que dans les années 70-80.

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  2. En premier lieu, je tiens à dire que votre blog se lit avec une remarquable fluidité. Tombée dessus par hasard grâce à Google, j'y ai trouvé de nombreuses réflexions qui m'animent aussi (sans aucune prétention du haut de mes petites 17 années). Il est intéressant de lire les réflexions qui se posent pour des personnalités "lambdas", du quotidien, tels que nous, et de voir les différentes manières de les aborder... en tout cas bravo pour votre écriture.

    En second lieu, je pense réellement qu'aujourd'hui, en France, et plus généralement en Europe, il n'existe pas réellement de partis de gauche qui visent à bouleverser l'ordre établi, et qui puissent honnêtement nier être social démocrates. A part un NPA (et autres groupuscules extrémistes) qui ne vise pas à conquérir le pouvoir politique, mais à "éveiller" la colère des masses, même le PCF reste un parti "social démocrate" au sens politique du terme.

    Il y a aujourd'hui, par la gouvernance européenne, par la gouvernance mondiale, une quasi impossibilité de se revendiquer de gauche, de vouloir conquérir le pouvoir politique, et, tout à la fois, de vouloir renverser l'économie de marché. L'idée d'une société socialiste semble se concrétiser bien plus par une "révolution par les urnes" (comme le dit Mélenchon) que par une conquête dans la rue. Et, en ce sens, par le biais du vote, on parle bien d'une social démocratie.

    Ce qui est inquiétant, en revanche, c'est l'émergence d'une idéologie social libérale, à la DSK, Ségolène Royal, Fabius et bien d’autres... ils subtilisent le libéralisme (économique) au modernisme, qu’ils déclarent comme le moyen pour le PS de convaincre la population et d’apporter un modèle politique « ambitieux, audacieux ». Trop de personnalités du PS se déchirent pour la forme, alors qu’ils sont liés sur le fond.

    Alors, c'est une idée comme une autre, mais je pense au contraire qu'il n'y a pas de modernisme à vouloir un social libéralisme – ce que beaucoup appellent (par erreur) social démocratie, je crois surtout que cela démontre à quel point les dirigeants socialistes se préoccupent plus de leurs intérêts que des idées de leurs militants, et de leurs sympathisants qui sont trompés, déçus.

    Mais surtout, il y a une panne théorique, un manque cruel de réflexion qui alimenterait - au delà des solutions apportées toutes faites - le débat et la résolution de l'immobilisme de la gauche. Il faudrait donc arrêter de pratiquer la politique politicienne qui n’apporte rien sur le moyen ou long terme, et se poser les bonnes questions. Re ‘contextualiser’ libéralisme politique, démocratie, qu’on a tendance à tenir pour synonymes, socialisme, social démocratie, que certains veulent opposer, etc.

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